A jointes mains vous proi, Douche dame, merchi. Liés sui quant je vous voi, A jointes mains vous proi; Avés merchi de moi, Dame, je vous empri. A jointes mains... |
A mains jointes, je vous implore, Douce dame, pitié ! Je suis heureux quand je vous vois, A mains jointes, je vous implore, Ayez pitié de moi, Dame je vous en prie ! A mains jointes... |
Hè, Diex quant verrai. Cheli que j'aim ? Certes je ne sai. Hé, Diex, quant verrai ? De vir son cors gai Meur tout de faim. Hé, Diex |
Ah, Dieu! quand verrai-je Celle que j'aime ? En vérité, je ne sais ! Ah, Dieu! quand la verrai-je ? A la voir si jolie, Je meurs de faim ! Ah, Dieu... |
Trop desir à veoir Che que j'aim. Ne m'en puis remouvoir, Trop desir à veoir, Et au main et au soir Me complain. Trop desir... Fines amouretes ai, Dieus, si ne sai quant les verrai. Or manderai m'amiete, Qui est cointe et joliete, Et s'est si saverousete C'astenir ne m'en porrai! Fines... Et s'ele est de moi enchainte, Tost devenra paile et tainte Si l'en est esclandele et plainte, Deshonerée l'arai. Fines... Miex vaut que je m'en astiengne Et pour li joli me tiengne Et que de li me souviengne Car s'onnour li garderai. Fines... |
Je désire trop voir Celle que j'aime! Je ne peux m'en passer, Je désire trop voir, Et matin et soir, Je ne cesse de me plaindre. Je désire... J'ai une amourette exquise, Dieu, pourtant, je ne sais quand je la verrai. Je demanderai à ma petite amie de venir, Qui est élégante et jolie, Et si savoureuse, Que je ne pourrai m'en abstenir. J'ai une amourette... Et si elle est enceinte par ma faute, Elle deviendra vite pâle et terne, Si scandale et plainte en résultent, Je l'aurai déshonorée. J'ai une amourette... Mieux vaut que je m'en abstienne, Et que je reste amoureux d'elle, Et que je me souvienne d'elle, Car je protègerai son honneur. J'ai une amourette... |
Diex comment porroie Sans cheli durer Qui me tient en joie ? Ele est simple et coie, Diex... Ne m'en partiroie Pour les iex crever Se s'amour n'avoie. Diex... |
Dieu, comment pourrais-je Vivre sans celle Qui fait ma joie ? Elle est simple et calme, Dieu... Dussé-je avoir les yeux crevés, Je n'abandonnerais pas son amour. Dieu... |
Je muir, je muir d'amourete, Las! aimi! Par defaute d'amiete, De merchi. A premiers le vi douchete, Je muir, je muir d'amourete, D'une atraiant manierete, A dont le vi, Et puis le truis si fierete, Quant li pri Je muir, je muir... |
Je meurs, je meurs d'amourette, Hélas, pauvre de moi ! Ma petite amie s'en est allée, Sans pitié. Elle me parut d'abord toute douce, Je meurs, je meurs d'amourette, Elle était si avenante, Quand je la vis, Et puis elle se montra si cruelle Quand je la priai ! Je meurs, je meurs... |
Adieu commant amouretes car je m'en vois, Souspirant en terre estrange. Dolans lairai les douchetes et mout destrois. Adieu... J'en feroie roïnetes s'estoie roys, Comment que la chose empraigne. Adieu... |
Je recommande mes amourettes à Dieu, car je m'en vais, Soupirant en terre étrangère. Plein de tristesse, je laisserai mes douces amies, plein de chagrin. Je recommande... J'en ferais des princesses, si j'étais roi, Quoique cela fasse. Je recommande... |
Devers Chastelvilain Me vient la robe au main Com uns oitours norois. Bon jor doint Dex demain Le seignor que tant ain ! Proudons est et cortois. De ci qu'en Navarrois N'a si bon chastelain De son chastel a plain Ne doute il les dous rois. Or vos di que Choisues Ne me vaut mais dous oes Qui me soloit valoir. Tot manjuent vermues Vermin et escurues N'en puis mais point avoir ! Et s'ont mis lor avoir En vaiches et en bues Et s'ont fait uns murs ripke Que Dex gart de cheoir ! Or m'en vois à Soilli Pieç'ai que n'assenai A si bone maison. Le seignor demandai Maintes foiz m'a donné Robes et maint bel don. Ce n'est pas en pardon Se j'en sui retornez, S'il n'est empeorez J'en avrai guierredon. Perdu ai dous chastelx Dont je sui moult engresx Et bien m'en doit chaloir; C'est Vignoriz, Rignez Dous seignors i a belx Qui me doignent valoir. S'ont mis a nonchaloir Armes et les cembelx. Il n'ont part ou mantel, Foi que doi Saint Eloir ! |
De Chastelvilain Cette robe me vient au matin, Comme un épervier nordique. Que, demain, Dieu donne un jour faste Au seigneur que j'aime tant! Il est parfaitement courtois. D'ici à la Navarre, Il n'y a si bon châtelain, De son château, Il ne craint pas les deux rois ! Je vous le dis: Choiseul N'a plus pour moi, même la valeur de deux oeufs, Lui qui m'apportait tant. Vermine et écureuils Dévorent tout, Je ne puis plus rien en recevoir ! Ils ont mis leurs biens Dans des vaches et des boeufs, Et ont construit une muraille neuve, Dieu la protège de la ruine ! A présent je m'en vais à Soilli, Je ne me suis pas dirigé depuis longtemps Vers une si bonne maison. Le seigneur, à ma demande, M'a mainte fois donné Vêtements et beaux cadeaux. Ce n'est pas pour rien Que j'y reviens, S'il n'est changé en mal, J'en aurai recompense. J'ai perdu deux châteaux, J'en suis bien attristé, Et à juste titre. Ce sont les châteaux de Vignoriz et de Rignez, Leurs deux seigneurs devraient être pour moi De grande valeur. Mais ils négligent désormais Les armes et les tournois. Ils n'ont pas droit au manteau, Par la foi que je dois à Saint Eloi ! |
Les oiselions de mon païs Ai oïz en Bretaingne. A leur chant m'est il bien avis Qu'en la douce conpaingne Les oi jadis. Se gi ai mespris ? Il m'ont en si douz penser mis Qu'à chançon fere me sui pris, Tant que je par ataingne Ce qu'amors m'ont lonc tens pramis. De longue atente m'esbahis, Sanz ce que je m'en plaingne. Ce me tout le gieu et le ris. Nus qui amors empraingne N'est del ententis. Mon cuer et mon vis, Truis mainte foiz si entrepris. Un foiz senblant j'ai apris Qui qu'en amors m'espraingne, Ainz certes plus ne li mesfis! |
Les oiselets de mon pays, En Bretagne, je les entendus. Ce chant, il me semble bien Que dans ma douce Champagne, Je l'entendais jadis. Me suis-je trompé? Ils m'ont mis en de si douces pensées Que j'ai entrepris mon chant Dans l'espoir de la récompense Qu'Amour m'a toujours promise. Je reste stupéfait de cette longue attente, Sans m'en plaindre, Mais j'en perds le goût des rires et des jeux. Quiconque aime, Ne se soucie de rien d'autre. Mon coeur et mon visage, Je les trouve maintes fois mal en point. Une fois, j'ai appris Que qui que ce soit qui m'enflamme d'amour, Jamais je ne lui serai déloyal ! |
Quant la sesons du douz tens s'asegure, Que biaus estés sera ferme et esclaire, Que toute riens a sa douce nature, Ment et retrait se trop n'est de male aire, Lors chanterai, car plus ne m'en puis taire, Pour conforter ma cruel aventure Qui m'est tonnée à grant mesaventure. J'aim et desir ce qui de moi n'a cure, Las! je li dis qu'amors me le fist faire. Or me het plus que nule criature, Et as autres la voi si debonaire, Qui ce m'a fet que nus ne puet deffaire Fors ses fuis cuers dont vers moi est si dure Qu'à la mort sui, se sa guerre mi dure. Amors, amors, je muir et sanz droiture, Ma mort, certes vous devroit bien desplaire, Car en vous ai toute mise ma cure Et mes pensers dont j'ai plus de cent paire, Sor vous devoit mes biaus servises plaire, Lors en seroit ma joie plus sëure, On dit pieça, qu'il est de tout mesure. Que cruels fet ses cuers s'il li otroie, Moi en haïr dont si la voi certaine Qu'en tot cest mont ne li demanderoie, Fors que s'amor qui à la mort me maine, S'ele m'ocit, que trop fera que vilaine, Et s'ensi est que por li morir doie, Ce est la mort dont melz morir vodroie. |
Quand la douce saison s'installe, Que le beau printemps s'affermit et s'éclaire, Que chaque chose revient à sa douce nature, Si elle n'est de mauvaise origine, Alors je vais chanter, car je ne peux plus me taire, Et dois me consoler de ma cruelle aventure, Qui a fait mon grand malheur. J'aime et désire quelqu'un qui ne se soucie pas de moi. Hélas, je lui dis que c'était par amour. Mais elle me hait plus que toute autre créature, Elle que je vois si bonne avec les autres, Qui m'a fait ce que nul ne peut défaire, Si ce n'est son coeur, si cruel envers moi Qu'il est voué à la mort, si elle continue à me faire le guerre. Amour, amour, je meurs injustement, Ma mort, certes, devrait bien vous déplaire, Car j'ai mis en vous tous mes soins, Et mes pensées, dont j'ai plus de cent paires. Mon parfait service aurait dû vous plaire, Et ma joie en serait alors plus certaine. On dit depuis longtemps qu'il faut de la mesure en tout. Son coeur agit cruellement, s'il lui fait me haïr; Ce qu'elle fait, je le vois. Car dans tout ce monde, je ne lui demanderais Que son amour, qui me conduit à la mort. Si elle me tue, elle agira trop déloyalement, Et s'il en est ainsi, que je doive mourir pour elle, C'est la mort que je choisirai de préférence ! |
L'autrier matin el moys de May Regis aeterni munere Que par un matin me levay Mundum proponens fugere En un plesant pré m'en entray Psalmos intendens psallere La Mère Dieu ilec trouvay Jam lucis orto sidere. Par le pré voit soutivement Celesti plena gracia Vers lui me trais isnelement Ejus sequens vestigia Et li dis: "Bele, à vous me rent Quam amo super omnia Qu'en vous habite apertement Eterna celi gloria" Après icest mot sans mentir Ascendit ad celestia Je vi encontre ele venir Sanctorum decem milia Je, qui remains, ploure et souspir Cordis tactus angustia Diex, verrai je jamès venir Beata nobis gaudia Mère de Dieu, vrai salut port Fons pietatis maxime De Celui m'envoiés confort Salutem prestans anime Garde moy de l'anemi fort Qui me temptat sepissime Paradis m'otroit à la mort Rerum Creator optime ! Amen. |
L'autre matin, au mois de Mai, Par un don du roi éternel, Je me levai de bon matin, Décidant de fuir le monde, J'entrai dans un charmant pré, Ayant l'intention de chanter des psaumes, Je trouvai là la mère de Dieu, L'astre de lumière était déjà levé. Dans ce pré, elle se promène avec élégance, Pleine de grâce céleste, Je me précipite vers elle, Suivant ses pas, Et lui dis: "Belle je me rends à vous, Que j'aime par dessus tout, Car en vous habite manifestement, La gloire éternelle du ciel". A ces paroles, je ne mens pas, Elle monta au ciel, Je vis vers elle venir Dix mille saints, Moi, je reste, pleure et soupire, Le coeur atteint d'angoisses, Dieu, verrai-je jamais venir, Une joie heureuse pour nous ? Mère de Dieu, vrai salut et refuge, Très grande source de piété, Envoyez moi son réconfort, Assurant le salut de l'âme, Protégez moi de la puissance du diable, Qui me tente très souvent. Que m'octroie à ma mort le Paradis, Le Très Grand Créateur de toutes choses ! Amen |
Dex est ausi comme li pellicans Qui fait son ni ou plus haut arbre sus, Et li mauvais oiseaux qui vient dejus, Ses oiselions ocist, tant est puanz! Li pères vient destrois et angoissox, Dou bec s'ocist, de son sanc dolorous Vivre refait tantost ses oiselions. Dex fist autel quant fu sa passions: De son douz sanc racheta ses anfanz Dou deable qui tant estoit poissanz. Nostre chief fait toz nos membres doloir, Por c'est bien droiz qu'à Deu nos en plaignons, Et granz corpes ra mout sus les barons Cui il poise quant aucuns vuet valoir, Et entre genz en font mout a blasmer Qui tant sevent et mentir et guiler, Le mal en font desor eus revenir, Et qui mal quiert, malx ne li doit faillir. Qui petit mal porchace a son pooir, Li granz ne doit an son cuer remenoir. Bien devriens en l'estoire veoir La bataille qui fu des dous dragons, Si con l'en trueve ou livre des Bretons, Dont il covient les chasteax jus cheoir. Ce est cist siegles cui il covient verser, Se Dex ne fait la bataille finer. Les jauz Mellin en covint fors issir Por devener qu'estoit a avenir. Mais Antecriz vient ce poëz savoir, Es maçues qu'anemis fait movoir. Savez qui sont li vil oisel punais Qui tuent Deu et ses enfançonnez? Li papelars dont li noms n'est pas nez, Cil ort puant, ort et vil et mauvais! Il ocient tote la simple gent, Par lor faus moz qui sont li Deu enfant. Papelart font le siegle chanceler, Par Saint Père! mal les fait encontrer! Il ont toloit joie, solaz et pès, Cil porteront en enfer le grant fès. Or nos doint Dex li servir et amer, Et la dame qu'on n'i doit oblier, Qu'il nos vuille garder a touz jors mais De maus oiseaus qui ont venin ès bès ! |
Dieu est comme le pélican, Qui fait son nid au sommet de l'arbre le plus haut; Et l'oiseau mauvais qui vient d'en bas Tue ses oisillons, tant il est vil ! Le père revient désemparé, au comble du désespoir; De son bec il se tue, mais son sang douloureux Fait aussitôt revivre ses oisillons. Dieu fit de même, lors de sa Passion: De son doux sang, il racheta ses enfants Du diable qui était si puissant. Notre tête fait souffrir tous nos membres, C'est pourquoi il est juste que nous nous en plaignons à Dieu. Il y a une très grande faute, sur les barons, Qui sont chagrin quand quelqu'un cherche des mérites. Ils sont à blâmer entre tous, Eux qui savent tellement mentir et tromper; Le mal en retombe sur eux. Celui qui veut se garder du mal, ne doit pas succomber au mal. Celui qui pourchasse de toute sa force un petit mal, Ne doit pas laisser un grand mal en son coeur. Nous devrions prendre en considération, dans la légende, La bataille entre les deux dragons, Comme on la trouve dans le livre des Bretons, A cause desquels les châteaux s'écroulaient : C'est l'image de notre temps qui nécessairement va s'écrouler, Si Dieu ne fait cesser la bataille. Pour deviner ce qui était advenu, Il fallut que les coqs de Merlin en sortent. Mais l'Antechrist vient, sachez-le, Dans les massues que l'ennemi brandit. Savez-vous qui sont les vils oiseaux puants Qui tuent Dieu et ses enfants ? Les hypocrites, dont le nom n'est pas digne, Ces gens qui sont puants et vils et mauvais ! Ils tuent tous les braves gens, -Par leurs faux mots- qui sont enfants de Dieu. Les hypocrites mettent le siècle en péril, Par le Saint Père, il est mauvais de les rencontrer ! Ils ont supprimé la joie, le plaisir et la paix: Ils en porteront le fardeau en enfer. Que Dieu nous donne de le servir et de l'aimer, Et la Dame, que l'on ne doit oublier, Qu'il nous veuille garder à tout jamais Des mauvais oiseaux qui ont le bec plein de venin ! |
Roÿne celestre Buer fusses tu nee Quant porte et fenestre Du ciel es nommee Tant es de haut estre, Pucele sacree, Qu'el ciel a sa destre T'a Diex coronnee : Car de ta mamele Qui tant est enmielee Fu de sa bouche bele Peue et abevree. Haute damoisele, Virge beneuree, Touz li mons t'apele Par tout t'es reclamee. Haute pucele pure et monde, De toi sourt la rousee Dont as toute la riens du monde Nourie et arousee. Roÿne ennouree Beur fusses engenree Car plus t'es douce et plus plesanz Et plus sade cent mile tanz Que mieuz en fresche ree. Riens qu'a saveur, Sanz ta saveur Ne m'est a savouree. Certes qui ne bee De toute sa pensee A toi servir, tout en apert, Puis bien dire que s'ame pert Et qu'ele en iert dampnee. Mes qui te sert Dieu en desert, Que buer fusses tu nee. Fontaine de grâce, Mère Dieu Marie, Queque chascuns face, Fouz est qui t'oublie. Tourne nous ta face, Qui tant est polie, De nous touz efface Toute vilanie. Enbasmée rose, De nouvel espanie, Touz li mons t'alose, Et vers toi s'umilie. Car en toi repose Et en toi se recrie Cil qui toute chose De nient forme et crie. Qui de bon cuer à toi s'otroie, Qui t'aime et sert et prie, Tu l'as tost mis à bone voie Et retrait de folie. En toi n'a boidie, Barat ne loberie, Tricherie ne fauseté, Por ce a bien son sort jetè Qui à toi se marie. Tu as biauté Et loiauté, Valeur et cortoisie. Ne foloie mie Qui de toi fait s'amie, Car cil qui t'aime de cuer fin Ne puet faillir à fine fin N'a pardurable vie. Por ce t'enclin, Por ce m'aclin A toi, Virge Marie. |
Reine céleste, bienheureuse, puisque tu es proclamée porte et fenêtre du ciel. Tu es de si haute valeur, vierge sacrée, que Dieu t'a couronnée à sa droite au ciel : car de ton sein doux comme le miel sa belle bouche fut nourrie et abreuvée. Noble maîtresse, vierge bienheureuse, le monde entier t'invoque, tu es priée partout. Noble vierge, pure et sans tâche, la rosée a sa source en toi, dont tu as nourri et arrosé toute chose de ce monde. Reine honorée, bienheureuse fut ta naissance, car tu es plus douce et plaisante et plus savoureuse cent mille fois que miel en rayon nouveau. Toute chose, sans ta saveur, n'a pas de saveur pour moi. En vérité, qui ne désire de toute sa pensée te servir, sans réticence, je peux bien dire qu'il perd son âme et qu'elle sera damnée. Mais qui te sert, il sert Dieu, bienheureuse fut ta naissance. Fontaine de grâce, Mère de Dieu, Marie, Quoique chacun fasse, il faut être fou pour t'oublier. Tourne vers nous ta face, si lisse, Efface de nous tous toute vilenie. Rose embaumée, récemment épanouie, Le monde entier chante ta louange, et se prosterne devant toi. Car en toi se repose, et se réconforte Celui qui crée toute chose à partir de rien. Qui s'offre à toi de bon coeur, qui t'aime, sert et prie Tu le mets sur la bonne voie et lui évite les erreurs. En toi il n'y a ruse, tromperie ni duplicité, Ni tricherie ni fausseté. C'est pourquoi il a bien choisi son destin Celui qui se marie avec toi. Tu as beauté et loyauté, Valeur et courtoisie . Il ne s'égare pas celui qui fait de toi son amie Car celui qui t'aime d'un coeur pur, ne peut manquer d'avoir une bonne fin Et la vie éternelle. C'est pourquoi je te salue, je me prosterne devant toi, Vierge Marie ! |
"Nous voici venus au temps froid Avec gel, neige, et boue Et si je succombe avec ces mots vrais D'Orange me vient la blessure Une dame place bien mal son amour Si elle aime un homme pour sa richesse, J'ai un ami de grande valeur Qui est au-dessus de tous Et il n'a pas un cour tricheur Envers moi, et il me donne son amour" |
Avec le temps qu'arbre défeuille
Quand il ne reste en branche feuille
Qui n'aille à terre
Avec pauvreté qui m'atterre
Qui de partout me fait la guerre
Au temps d'hiver
Ne convient pas que vous raconte
Comment je me suis mis à honte
En quelle manière
Que sont mes amis devenus
Que j'avais de si près tenus
Et tant aimés
Ils ont été trop clairsemés
Je crois le vent les a ôtés
L'amour est morte
Le mal ne sait pas seul venir
Tout ce qui m'était à venir
M'est avenu
Pauvre sens et pauvre mémoire
M'a Dieu donné, le roi de gloire
Et pauvre rente
Et droit au cul quand bise vente
Le vent me vient, le vent m'évente
L'amour est morte
Ce sont amis que vent emporte
Et il ventait devant ma porte
Les emporta
Be la volgra sola trobar, que dormis, o'n fezes semblan, per qu'e lh embles un doutz baizar, pus no valh tan qu'eu lolh deman. per Deu, damna, pauc esplecham d'amor ! vai s'en lo tems, e perdem lo melhor ! parlar degram ab cubertz entresens, e, pus no'ns val arditz, valgues nos gens ! Be deuri 'om domna blasmar, can trop vai son amic tarzan, que lonja paraula d'amar es grans enois e par d'enjan, c'amar pot om e far semblan alhor, e gen mentir lai on non a autor, bona domna, ab sol c'amar mi dens, ja per mentir eu no serai atens. Messatger, vai, e no m'en prezes mens, s'eu del anar vas midans sui temens. |
Que je voudrais la trouver seule, endormie ou faisant semblant, pour lui ravir le doux baiser, que je n'ai pas le courage de lui demander. Pardieu, Dame, nous faisons trop peu de cas de l'amour ! le temps s'en va, et nous perdons le meilleur ! Nous devons user entre nous d'un langage secret, et, si nous ne sommes pas les plus courageux, être les plus fins ! Bien digne de blâme, est celle qui impose de trop longs délais à son ami, trop longtemps se faire prier, c'est causer de grands maux et montrer de la déloyauté, On peut aimer, n'est-il pas vrai, et ailleurs faire semblant ; il est aisé de mentir quand il ny a personne pour vous voir, Mais moi, douce dame, du moment où tu m'auras accordé ton amour, jamais tu n'auras de mensonge à me reprocher. Va, messager, et ne m'en estime pas moins si je n'ose aller moi même trouver ma dame. |
Quan vei la lauzeta mover | Quand je vois l'alouette, de joie agiter |
De joi sas alas contra-l rai | Ses ailes contre le rayon [du soleil] |
Que s'oblid'e-s laissa chazer | Qui s'oublie et se laisse tomber à cause |
Per la doussor qu'al cor li vai | De la douceur qui pénètre son coeur |
Ai! Tan grans enveia m'en ve | Ah! Quelle grande envie me vient |
De cui qu'eu veia jauzion | De tous ceux que je vois joyeux ! |
Meravilhas ai car desse | Et je m'émerveille qu'aussitôt |
Lo cor de dezirier no-m fon. | Mon coeur ne se fonde point de désir |
Ferai chansonnette nouvelle, Avant qu'il vente, pleuve ou gèle; Ma dame m'éprouve, tente De savoir combien je l'aime; Mais elle a beau chercher querelle, Je ne renoncerai pas à son lien. Je me rends à elle, je me livre, Elle peut m'inscrire en sa charte; Et ne me tenez pour ivre Si j'aime ma bonne dame, Car sans elle je ne puis vivre, Tant de son amour j'ai grand faim. Elle est plus blanche qu'ivoire, Je n'adorerai qu'elle ! Mais, si je n'ai prompt secours, Si ma bonne dame ne m'aime, Je mourrai, par la tête de Saint-Grégoire, Un baiser en chambre ou sous l'arbre ! Qu'y gagnerez-vous, belle dame, Si de votre amour vous m'éloignez ? Vous semblez vous mettre nonne, Mais sachez que je vous aime tant Que je crains la douleur blessante Si vous ne faites droit des torts dont je me plains. Que gagnerez-vous si je me cloître, Si vous ne me tenez pas pour vôtre ? Toute la joie du monde est nôtre, Dame, si nous nous aimons, Je demande à l'ami Daurostre (*) De chanter, et non plus crier. Pour elle je frissonne et tremble, Je l'aime tant de si bon amour ! Je n'en crois jamais née de si belle En la lignée du seigneur Adam. * Daurostre était le jongleur de Guillaume |
Ecce mundi gaudium Ecce salus gentium Virgo parit filium Sine violentia. Ave virgo regia Dei plena gratia ! Natus est de virgine Sine viri semine Qui mundat a crimine Rex qui regit omnia. Ave virgo... Angelus pastoribus Natus est in gentibus Qui dat pacem omnibus Sua providentia. Ave virgo... Reges tria primia Offerentes varia Stella ducit previa Ad salutis gaudia. Ave virgo... Cum nil scire potuit De nato rex fremuit Et tota gens tremuit Christi natalicia. Ave virgo... Cum mori per gladios Rachel videt proprios Mesta plorat filios Nulla sunt solatia. Ave virgo... |
Voici la joie du monde, Voici le salut des peuples, La Vierge a fait naître un fils Sans violence ! Salut, Vierge reine Pleine de grâce de Dieu ! Il est né de la Vierge Sans semence virile, Lui qui lave les péchés, Le roi qui règne sur toutes choses. Salut.. L'ange dit aux bergers: Il est né pour tous les peuples, Lui qui donne la paix à tous Par sa providence. Salut... Les trois rois Offrent différents cadeaux, Quand une étoile les guide Vers la joie du salut. Salut... Comme il ne pouvait connaître La naissance, le roi Hérode enragea, Et tout le peuple trembla, Le jour de la naissance du Christ ! Salut... Lorsque Rachel voit le massacre De ses fils par le glaive, Elle pleure. Rien ne peut la réconforter. Salut... |
Lasse que deviendrai gié Que cil juif esragié Ont mon fil tant outragié Qu'à un mort le m'ont changié, Et sans nul forfait M'ont si grant tort fait ? Filz onques ne fus estous, Mès plus souefs et plus dous Que n'est lais ne miaus ne mous, Tant mar fu vostre biau voz ! Diex, pour coy mouri Flours qui si flori ? Onques ne cuidai savoir Que deulz est, or le savrai, Maintes joies seul avoir, Ne sai se plus en avrai, Bien dit l'escripture voir, Partans m'en apercevrai Que j'avoie a recevoir Un glaive : or le recevrai. Biaus fix, tu fus concëus Et naquis très glorieusement, Des bestes fus connëuz En la creiche tout premièrement, Et des rois apercëus Qui t'offrirent leur dons doucement. Toute riens fu esbaudie Quant mes ventres t'enfanta. Nis la bele compaignie Des celz en rist et chanta. Quant la mort vint sor ta vie, Li cielz s'en espoventa, Moult dëust estre garie Dame qui tel enfanta ! Mès n'i voi pas ma guerison Quar je ne sui mès mère, Tolu m'a l'en par trahison Mon chier filz et mon père, Or si l'a mis en sa prison La mort dure et amère Li philosophe que nous lison Y prirent leur matère. Biaus douz filz, vous me laissiez La doulour profonde, Cist deulz dont vous me paissies Crieng ne me confunde. Toute joie est abaissiez Et douleur habunde, Quant li arbres est plaissiez Qui paissoit tout le monde. Nule riens que Dies cria Ne me pourroit apaisier. Lasse! com mal deulz ci a! Moult se doit or esmaier Li folz qui mon fil lia Et li fist le sanc raier. Ce sachiez, Diex l'oublia. Mau jour li ajourna hier. Onques ne senti doulour, Biau filz quant vous fustes nez, Ne ne muay la coulour: Ne povoit estre esgenez Li cors qui de tel seignour Avoit esté habités, Plus grand duel, nus n'ot gregnour Dont vous estes si menés. Biau filz, je vous alaitai. Mors estes, dolente en sui ! Mainte fois vous afetai Ou bercuel, si com je dui. Pour Herode vous guetai, Et jusqu'en Egypte enfui, Onques ne me deshaitai Autre tant com je faiz hui. A martire sui livrée, Ne sai qui ce destina. Li juif m'ont desertée: Onques nus d'euz ne fina D'avoir vers mon fil mellée: Mors est qui maulz voisin a! Voirement est ce l'espée Dont Syméon devina. Ne puis mon cuer estanchier, En plourant m'estuet vengier Et tout mon cuer destrenchier, Ou de mon cors l'esrachier, Jamès ne seulz avoir De trop grant avoir, Ne me pris un grain de mil, Or m'en irai en essil. A Dieu commande mon fil Qui fu abuvrés d'aisil Et mis en la crois. Ci me faut la vois. |
Hélas, que deviendrai-je, Car ces juifs enragés Ont tant maltraité mon fils Qu'ils l'ont mis à mort, Et sans nulle faute de sa part, M'ont fait si grand tort ? Fils, jamais tu ne fus arrogant, Mais plus tendre et doux Que lait, miel ou mousse. Quel malheur pour votre beau visage! Dieu, pourquoi mourut Une fleur qui fleurit ainsi! Jamais je ne pensais connaître Ce qu'est le malheur, maintenant je le saurai; J'ai connu beaucoup de joies, Je ne sais plus si j'en connaitrai. L'Ecriture dit bien la vérité, J'aurai bien l'occasion de m'en apercevoir: Je devais recevoir Un glaive, je le recevrai. Cher fils tu fus conçu Et naquis très glorieusement, Tu fus reconnu par les bêtes D'abord dans la crèche, Et désigné par les rois Qui t'offrirent leurs cadeaux avec tendresse. Tout être fut rempli de joie Quand mon ventre t'enfanta; Même la belle compagnie Des cieux en rit et chanta. Quand la mort te prit la vie, Le ciel en fut épouvanté. Elle aurait dû être bien protégée La Dame qui eut un enfant tel que toi! Mais je ne vois pas mon salut, Car je ne suis plus mère; On m'a pris par trahison Celui qui était mon fils chéri et mon père. Maintenant, la mort cruelle et amère L'a fait son prisonnier; Les philosophes que nous lisons Y ont pris leur matière. Cher et doux fils, vous m'avez laissé Une douleur profonde. Ce malheur dont vous m'avez nourrie, Je crains qu'il ne me détruise. Toute joie est anéantie, Et la douleur triomphe, Quand l'arbre qui nourrissait Le monde entier, est détruit. Rien de ce que Dieu créa Ne pourrait m'apporter la paix. Hélas, quelle douleur! Il doit bien souffrir, Le fou qui a lié mon fils Et fit couler son sang! Sachez que Dieu l'oublia; C'est un mauvais jour qui s'est levé pour lui hier! Je ne sentis pas de douleur, Cher fils, à votre naissance, Et mon teint ne changea pas: Il ne pouvait être endommagé, Le corps qui avait été habité d'un tel seigneur Il n'y eut pas de plus grande douleur Que celle qui vous fait souffrir. Cher fils,je vous allaitais; Vous êtes mort: j'en souffre! Souvent, je vous soignais Dans le berceau, comme je le devais; A cause d'Hérode, je vous protégeais, Et je m'enfuis jusqu'en Egypte. Jamais je n'eus de peine Comme aujourd'hui! Je suis au martyre, Je ne sais qui m'a donné ce destin. Les juifs ont fait ma perte: Jamais ils ne cessèrent De chercher querelle à mon fils, Il est mort celui qui a un mauvais voisin! Vraiment, c'est le glaive Dont parla Siméon dans sa prophétie. Je ne peux arrêter le sang qui coule de mon coeur, Je dois me venger en pleurant, Et mettre en pièce mon coeur Ou l'arracher de mon corps; Je n'ai jamais eu coutume De posséder de richesse, Et je ne m'estime pas la valeur d'un grain de mil, Maintenant, je partirai en exil; Je recommande mon fils à Dieu, Qui fut abreuvé de vinaigre Et mis en la croix. Désormais, la voix me fait défaut... |
Salve virgo virginum Salve sancta parens Genuisti filium Salve sancta parens Creatorem omnium Salve sancta parens Qui regit imperium Omni labe carens Salve... Tu patrem ac dominum Salve sancta parens Roga salus hominum Salve... Ut nutriat populum Salve... Vite fundens poculum Virgo flos non arens Salve... Cordibus fidelium Salve sancta parens Verum desiderium Salve... Prestet et solatium Salve... Nostrum refrigerium Mundo lumen darens Salve... |
Salut, vierge des vierges, Salut, mère sainte, Tu as mis au monde un fils, Salut, mère sainte, Créateur de toutes choses, Salut, mère sainte, Qui règne sur le monde, Exempte de toute souillure, Salut, ... Toi, au père et au maître, Salut, mère sainte Demande le salut des hommes, Salut... Pour qu'il nourrisse le peuple, Salut... Versant le breuvage de la vie, Vierge, fleur non altérée, Salut, ... Dans les coeurs des fidèles, Salut, mère sainte Vrai désir, Salut... Elle assure la consolation, Salut... Notre bonheur éternel, Lumière éclairant le monde, Salut... |